L'Ile de la Cité 2040 : 35 propositions pour faire battre le cœur de la capitale

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Comment redonner vie à l’Ile de la Cité ? A travers leur projet urbain, Dominique Perrault, architecte, et Philippe Bélaval, président du Centre des monuments nationaux, veulent rompre avec "l’urbanisation organique" qui, pendant plus d’un millénaire, a cherché "à lutter contre la Seine" ; mais aussi redonner à la communauté cette "cité insulaire", confisquée en partie par les aménagements "hygiénistes" du Baron Haussmann. Les co-auteurs plaident pour "une intervention pluridirectionnelle" intégrée aux projets de réaménagement en cours du centre de la capitale, avec, en fond, la perspective d’une tenue des JO en 2024 et de l’accueil de l’Exposition universelle en 2025.
L’Ile de la Cité est un des quartiers les moins denses de la capitale. Difficile d’y croire pour le piéton qui la traverse, et pourtant… Le rapport fait état d’un foncier disponible de 100 000 m2, "soit une valeur foncière nouvelle dépassant le milliard d’euros".

Un an après avoir été missionnés par le président de la République, Dominique Perrault et Philippe Bélaval ont rendu leur rapport (www.missioniledelacite.paris) sur le devenir de l’Ile de la Cité. Composé de 35 propositions, pour ouvrir et redynamiser "le cœur du cœur" de la capitale, leur programme articule des mesures de court terme (2017–2024) et un plan d’actions à plus lointaine échéance, d’ici à 2040. Le projet vise à mettre en cohérence les espaces publics, réviser les logiques spatiales, repenser les schémas de mobilité, requalifier les rives pour renouer avec la Seine et valoriser un patrimoine d’exception, dont la cathédrale Notre-Dame de Paris.
L’Ile de la Cité est "un projet urbain non identifié, méconnu et ignoré des politiques publiques d’aménagement depuis des décennies", constatent les deux hommes. Eux proposent "une multitude d’interventions architecturales ciblées capables de mettre en résonance l’île dans sa globalité".

Sortir l’île de ses fonctions administratives
Dans le courant de l’année 2017, les services du Tribunal de grande instance et de la préfecture de police déménageront dans le 17e arrondissement (ZAC Clichy-Batignolles). L’occasion pour en finir avec "les façades hermétiques du Palais de justice, de l’Hôtel-Dieu et de la préfecture de police". Derrière ces blocs monolithiques repliés sur eux-mêmes, le potentiel est énorme. Sans amputer totalement l’île de son caractère institutionnel, la mission souhaite redéfinir clairement les statuts des parcelles ouvertes au public et redonner au citoyen la possibilité de découvrir les beautés du site "en investissant chaque anfractuosité de l’île, ses espaces cachés, cours intérieures, passages et sous-sols".
En ce sens, certaines des propositions prévoient d’"habiter les cours de l’Hôtel-Dieu en les couvrant par des verrières" ; d’"agrandir par le dessous et convertir le Tribunal de commerce en grand équipement public" ; de "renforcer les fonctions juridictionnelles" du Palais de justice (qui ne conservera sur l’île que la cour d’appel et la cour de cassation) "vers l’Ouest sur la rue de Harlay par une refonte des accès et des flux", ou encore d’"investir certaines cours du Palais de justice".

Reconquêtes et reconnexions
Dans un contexte contraint par des mesures de protection du site, justifiée par son patrimoine d’exception, la mission entend renforcer l’attrait de l’île. Objectif : prolonger le temps de parcours des visiteurs, attirés essentiellement par les monuments ; qu’ils puissent apprécier l’île "en tant qu’objet patrimonial". Autrement dit : faire évoluer l’île aux monuments vers une "île-monument". Il faudra s’affranchir, pour cela, de plusieurs écueils. En particulier l’insuffisance des infrastructures touristiques et le manque cruel de signalétique. L’une de leurs propositions prévoit par exemple "de redessiner en cohérence les revêtements de sol, le mobilier urbain et la signalétique, à l’instar de la Place Vendôme".
Autre point noir : les commerces et la restauration "ne se situent pas tous à la hauteur du lieu". La mission, qui s’est largement penchée sur la requalification des rives et des liens entre l’île et son fleuve, propose d’"investir la Seine par l’installation de nouvelles plateformes flottantes sur le bras Sud du fleuve accueillant piscine, cafés, ateliers, activités…".
Pour rendre l’île plus accueillante, les mobilités doivent également être redéfinies. Sans pour autant bannir la circulation automobile – sauf sur le Pont de l’Archevêché "afin de créer un parcours piéton du Quai de la Tournelle à l’île Saint-Louis" -, la question du stationnement doit être traitée "en priorité".
Autre élément phare du projet : l’exploitation des sous-sols. Avec la création, notamment, d’un sol en verre permettant de dévoiler la crypte archéologique du parvis de Notre-Dame. Ou encore l’aménagement d’une "grande galerie" pour "relier, par le dessous, l’ensemble des institutions situées autour de la place de Lutèce".

 

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