En ouverture de la Conférence des villes, organisée par France urbaine, le 20 septembre à Paris, Edouard Philippe s’est attaché à clarifier plusieurs sujets, dont le flou entretenu ces dernières semaines entachait sérieusement les relations entre l’Etat et les collectivités. Il a notamment confirmé et précisé ce qui avait été esquissé au sujet des 13 Md€ d’économies demandées aux collectivités : "il ne s’agit en aucun cas d’une baisse nette de votre dépense locale. Nous, nous vous demandons de maîtriser sa hausse, c’est très différent ! C’est-à-dire que vos dépenses vont bien continuer à augmenter en valeur absolue. Mais nous vous demandons d’infléchir la courbe, afin de limiter cette augmentation". Le "mécanisme contractuel" que le gouvernement souhaite signer avec les "grandes collectivités" devra "fixer précisément les objectifs à atteindre", comprenant une "règle d’or renforcée".
Concrètement, les préfectures signeront un contrat avec les 319 collectivités et EPCI qui réalisent deux tiers des dépenses de fonctionnement (régions, départements, communautés d’agglomération de plus de 150 000 habitants et communes de plus de 50 000 habitants). Elles s’engageront à maîtriser leurs dépenses à 1,2 % par an hors inflation pendant cinq ans, et à augmenter leur capacité d’autofinancement de l’investissement, en minorant le recours à l’endettement. L’économie attendue est de 2,6 Md€ par an sur les dépenses de fonctionnement. En cas de non-respect des engagements, "le retour de bâton sera d’autant plus fort en 2019", a prévenu le Premier ministre.
Augmentation des dotations en 2018
Autre confirmation du Premier ministre devant France urbaine : les concours financiers de l’Etat aux collectivités ne baisseront pas l’année prochaine, ils seront même "légèrement augmentés de 0,4 %, soit 400 M€". Lors d’une présentation du budget 2018 aux associations d’élus, le 22 septembre, le gouvernement a indiqué que les fonds de péréquation seraient augmentés de 190 M€, avec notamment 90 M€ de plus pour la dotation de solidarité urbaine (DSU), et le même montant pour la dotation de solidarité rurale (DSR). En outre, 1,8 Md€ sera consacré, en 2018, à l’investissement local, notamment pour la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR, 996 M€), la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL, 665 M€) et la dotation de soutien aux quartiers prioritaires de la politique de la ville (150 M€).
Enfin, sur l’exonération de taxe d’habitation (TH) pour 80 % des contribuables, qui doit être mise en œuvre progressivement à partir de l’année prochaine, Edouard Philippe a répété qu’il n’y aurait "pas d’impact sur les collectivités", puisque "l’Etat procédera par dégrèvement, c’est-à-dire en payant à la place du contribuable local". La compensation sera, par ailleurs, calculée en 2020 sur la base des taux votés en 2017.
"13 Md€, c’est inatteignable, cela fait dix ans qu’on serre les boulons", a pesté André Laignel, président (PS) du Comité des finances locales (CFL), lors de la table-ronde qui a suivi. Quant à l’exonération de TH, elle constitue un "recul de l’autonomie fiscale des collectivités". Il rappelle, "d’expérience", que "le dégrèvement n’est pas gravé dans le marbre…" Il annonce qu’il combattra ces mesures, "tant qu’elles ne sont pas passées dans la loi". "Attendons le débat", acquiesce François Baroin, président (LR) de l’Association des maires de France (AMF), qui ajoute que "le chemin constitutionnel est étroit, rien n’est joué".